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le robinson suisse.

« N’êtes-vous pas d’avis, me dit Ernest, que nous devrions faire de cette grotte un nouvel établissement ? Le local est tout trouvé, et on pourrait la défendre facilement par une palissade à la Robinson Crusoé.

— C’est bien mon intention, répondis-je. D’abord, à deux reprises différentes, nous l’avons trouvée occupée par des hôtes trop incommodes pour ne pas nous l’approprier ; en second lieu, je tiens beaucoup à pouvoir exploiter ma carrière de mica ; et enfin, si nos plantations de poivre ne réussissent pas, il faudrait pouvoir venir sans danger renouveler ici nos provisions. Maintenant il s’agit de mettre ce projet à exécution. Qu’entends-tu par une palissade à la Robinson ?

— Une barrière formée d’arbustes, croissant rapidement, que nous planterions à l’entrée. Ne vous rappelez-vous pas que c’est ainsi que, dans le livre de Daniel de Foë, Robinson défendit sa demeure ? Et au bout de quelques années, dit l’écrivain, la palissade était devenue si serrée, qu’on était obligé de l’escalade avec une échelle qu’on retirait ensuite à l’intérieur.

— Ton idée n’est pas mauvaise ; mais pourrons-nous la mettre en pratique ? Car remarque que tu viens de tracer ici des plans dont l’exécution doit nous coûter plusieurs mois de travail. Toujours est-il que ton projet me paraît raisonnable. Je serais donc d’avis que l’on donnât ton nom à cette fortification.

— Je vous prie de me dispenser de cet honneur ; j’aime beaucoup mieux que cette grotte conserve le nom d’Antre aux ours que de lui voir rappeler, non pas mes plans d’architecture, mais bien plutôt la frayeur que j’y ai éprouvée.

— Allons, soit ! nous changerons seulement ce mot d’antre qui a quelque chose de trop sauvage, et nous lui donnerons le nom de Fort des ours. »

Nous parlions encore quand un galop lointain nous avertit du retour de nos chasseurs. Ils arrivaient rapidement