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Page:John Ruskin par Frédéric Harrison.djvu/135

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sombre photographie prise en 1895, par Hollyer, quand il en avait 76, la longue barbe blanche couvrant la bouche et les joues et tombant sur la poitrine jusqu’aux bras croisés et aux mains jointes, avec le profil rigide du nez aquilin et toute l’apparence d’un homme plein de tristes souvenirs et d’espérances déçues. Il faut placer la photographie d’Hollyer de 1895 en face du pastel de Richmond, en 1857, pour mesurer l’immense changement que ces quarante années imprimèrent sur cette âme toute de sensibilité.

En 1860, Ruskin était un homme d’apparence délicate mais plein de vivacité, avec un air de bonhomie naturelle, de manières courtoises et enjouées, alerte et inépuisable discoureur. Il portait cette fameuse cravate bleue, avec la redingote à l’ancienne mode, et le collet de velours, n’ayant ainsi rien de commun avec le pensionnaire de Christ Church de cette époque ni d’aucune autre. Il parlait avec un léger accent écossais, en roulant les r. Ainsi que je l’écrivais à l’époque de sa mort dans le numéro de février 1900 du journal Literature : « Il était l’image même de la courtoisie avec un charme indicible de bonté toute spontanée. Ce n’était point la grâce un peu surannée de M. Gladstone, ni la puissante simplicité de Tourgénieff — tous les deux renommés pour la politesse extrême de leurs manières — c’était plutôt