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Page:John Ruskin par Frédéric Harrison.djvu/282

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et de la science ; son manque de loyauté vis-à-vis de ses adversaires, de ses amis et son insolence vis-à-vis de tous son arrogance et son absorption dans une sorte de cocon d’égoïsme qu’il s’était filé à lui-même. Oui ! car son grand cœur et son rare génie avaient été dès l’enfance déviés et pervertis par deux influences malheureuses — d’abord l’isolement dans lequel on l’avait élevé comme une sorte de Dalaï Lama, loin de la vue et du contact du monde extérieur ; puis, la saturation de son esprit par une théologie toute mystique qui lui apprit à traiter toutes choses comme absolument bonnes, ou absolument vraies, comme absolument mauvaises ou absolument fausses dans un monde où, comme l’a dit Comte, tout est relatif, dans un monde où l’homme ne peut connaître que des vérités relatives et ne peut jamais espérer qu’un bien relatif.

On a souvent dit que Ruskin était un disciple de Carlyle et on l’a souvent comparé à Tolstoï ; lui-même se reconnaissait quelque ressemblance avec Swift et il a des analogies avec Rousseau ; mais en ce qui concerne la plupart de ses jugements historiques et de ses projets de réorganisation sociale, on trouve de curieuses coïncidences qui le rapprochent d’un homme dont il ne connut rien, dont il ne parlait qu’avec horreur et mépris et dont les habitudes d’esprit et l’existence contrastent violem-