Page:John Stuart Mill - De l’assujettissement des Femmes.djvu/158

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ce qu’ils sont, constitue leur droit à la déférence, et surtout que le mérite, non la naissance, est le seul titre légitime à l’exercice du pouvoir et de l’autorité. Si jamais une personne humaine n’avait sur une autre une autorité qui de sa nature ne fût pas temporaire, la société ne passerait pas le temps à flatter d’une main des penchants qu’elle doit réprimer de l’autre : pour la première fois depuis que l’homme est sur la terre, l’enfant serait dressé à marcher dans la vie où il doit s’avancer, et, quand il serait grand, il y aurait une chance qu’il ne la quittât pas. Mais, tant que le droit du fort à la puissance sur le faible régnera au cœur même de la société, on aura à lutter avec de douloureux efforts pour faire reposer les relations humaines sur le principe que le faible a les mêmes droits que le fort, et la loi de la justice, qui est aussi celle du christianisme, ne régnera jamais pleinement sur les sentiments de l’homme ; ils travailleront contre elle, alors même qu’ils s’inclineront devant elle.

Le second bienfait, qu’on peut attendre de la liberté qu’on donnera aux femmes d’user de leurs facultés, en les laissant choisir librement la manière de les employer, en leur ouvrant le même champ d’occupation, et leur proposant les mêmes prix et les mêmes encouragements qu’aux hommes, serait de doubler la somme des facultés intellectuelles que l’hu-