Page:John Stuart Mill - De l’assujettissement des Femmes.djvu/170

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aux hommes, reconnaissent de la façon la plus claire l’action démoralisatrice de l’aumône et des secours, et qu’elles pourraient en remontrer à bien des économistes de l’autre sexe. Mais les femmes qui se bornent à donner des secours et qui ne se mettent pas face à face avec les effets qu’ils produisent, comment pourraient-elles les prévoir ? Une femme née dans le sort actuel des femmes, et qui s’en contente, comment pourrait-elle apprécier la valeur de l’indépendance ? Elle n’est point indépendante et n’a pas appris à l’être ; sa destinée est de recevoir tout des autres, pourquoi donc ce qui est bon pour elle ne le serait-il pas pour les pauvres ? Le bien ne lui apparaît que sous une seule forme, celle d’un bienfait descendant d’un supérieur. Elle oublie qu’elle n’est pas libre et que les pauvres le sont ; que si on leur donne ce dont ils ont besoin sans qu’ils le gagnent, ils ne sont plus forcés de le gagner ; que tout le monde ne peut pas être l’objet des soins de tout le monde, mais qu’il faut aux gens des motifs qui les poussent à prendre soin d’eux-mêmes, et que la seule charité qui soit en définitive une charité, et se montre par le résultat digne de ce nom, c’est celle qui aide les gens à s’aider eux-mêmes s’ils en sont physiquement capables.

Ces considérations montrent combien la part que les femmes prennent à la formation géné-