Page:John Stuart Mill - De l’assujettissement des Femmes.djvu/3

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C’est toujours une lourde tâche que d’attaquer une opinion à peu près universelle. À moins d’un très grand bonheur ou d’un talent exceptionnel, on n’arrive pas même à se faire écouter. On a plus de peine à trouver un tribunal qu’on n’en aurait ailleurs à obtenir un jugement favorable. Parvient-on à arracher un moment d’attention, il faut, pour le payer, subir des conditions inouïes. Partout la charge de faire la preuve incombe à celui qui affirme. Quand un individu est accusé de meurtre, c’est à l’accusateur de fournir les preuves de la culpabilité de l’accusé, non à celui-ci de démontrer son innocence. Dans une contestation sur la réalité d’un événement historique qui intéresse médiocrement les sentiments de la plupart des hommes, la guerre de Troie par exemple, ceux qui soutiennent la réalité de l’événement sont tenus de produire leurs preuves avant leurs adversaires, et ceux-ci ne sont jamais astreints qu’à démontrer la nullité des témoignages allégués. Dans les questions d’administration, on admet que le fardeau de la preuve doit être supporté par les adversaires de la liberté, par les partisans des mesures restrictives ou prohibitives, qu’il s’agisse d’apporter une restriction à la liberté, qu’il s’agisse de frapper d’une incapacité ou d’une inégalité de droits une personne ou une classe de personnes. La présomption a priori est en faveur de la