Page:John Stuart Mill - De l’assujettissement des Femmes.djvu/45

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le caractère d’une femme quand on connaît les opinions de son mari sur les femmes en général. Pour tirer de ce cas unique quelque résultat, il faut que la femme vaille la peine d’être connue, et que l’homme soit non seulement un juge compétent, mais aussi qu’il ait un caractère si sympathique et si bien adapté à celui de sa femme, qu’il puisse lire dans son esprit par une sorte d’intuition, ou que sa femme n’ait aucune confusion à lui montrer le fond de ses sentiments. Rien n’est peut-être plus rare qu’une telle rencontre. Il y a souvent entre une femme et son mari une unité complète de sentiments et une communauté de vues quant aux choses extérieures, et pourtant l’un ne pénètre pas plus profondément dans les vues de l’autre que s’ils n’étaient que de simples connaissances. Alors même qu’une véritable affection les unit, l’autorité d’une part et la subordination de l’autre empêchent qu’une confiance entière s’établisse. Il se peut que la femme n’ait pas l’intention de dissimuler, mais il y a bien des choses qu’elle ne laisse pas paraître. Entre les parents et les enfants, on peut voir la même chose. Malgré l’affection réciproque qui unit réellement un père à son fils, il arrive quelquefois, au su de tout le monde, que le père ignore et même ne soupçonne pas certaines parties du caractère de son enfant, tandis que les camarades et les égaux du fils les connaissent à merveille. La