Page:John Stuart Mill - De l’assujettissement des Femmes.djvu/52

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disait-on, qu’ils ne veulent pas s’enrôler volontairement, donc il faut que nous ayons le pouvoir de les contraindre. » Que de fois n’a-t-on pas raisonné de la sorte ! S’il n’y avait eu un certain vice dans ce raisonnement, il eût triomphé jusqu’à présent. Mais on pouvait répliquer : commencez par payer aux matelots la valeur de leur travail, quand vous l’aurez rendu aussi lucratif chez vous qu’au service des autres employeurs, vous n’aurez pas plus de difficulté qu’eux à obtenir ce que vous désirez. À cela, pas d’autre réponse logique que, « nous ne voulons pas » : et comme aujourd’hui on rougit de voler au travailleur son salaire et qu’on a même cessé de le vouloir, la presse n’a plus de défenseurs. Ceux qui prétendent contraindre la femme au mariage en lui fermant toutes les autres issues s’exposent à une pareille réplique. S’ils pensent ce qu’ils disent, leur opinion signifie que les hommes ne rendent pas le mariage assez désirable aux femmes, pour les tenter par les avantages qu’il présente. On ne parait pas avoir une haute opinion de ce qu’on offre quand on dit en le présentant : Prenez ceci ou vous n’aurez rien. Voici, selon moi, ce qui explique le sentiment des hommes qui ressentent une antipathie réelle pour la liberté et l’égalité des femmes. Ils ont peur, non pas que les femmes ne veuillent plus se marier, je ne crois pas qu’un seul éprouve