Page:John Stuart Mill - De l’assujettissement des Femmes.djvu/65

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les degrés dans la manière de sentir ces devoirs, comme on trouve tous les degrés dans la bonté ou la méchanceté, en descendant jusqu’aux individus qui ne respectent aucun lien, et sur lesquels la société n’a d’autre moyen d’action que l’ultima ratio, les pénalités édictées par la loi. À tous les degrés de cette échelle descendante, il y a des hommes qui possèdent tous les pouvoirs légaux d’un mari. Le plus vil malfaiteur a une misérable femme, sur laquelle il peut commettre toutes les atrocités, sauf le meurtre, et même, s’il est adroit, il peut la faire périr sans encourir le châtiment légal. Que de milliers d’individus n’y a-t-il pas dans les plus basses classes de chaque pays, qui, sans être des malfaiteurs au sens de la loi, à tous les autres points de vue, parce que leurs agressions rencontrent partout ailleurs de la résistance, s’abandonnent à tous les excès de la violence sur la malheureuse femme qui seule, avec ses enfants, ne peut ni repousser leur brutalité ni s’y soustraire ! L’excès de dépendance où la femme est réduite inspire à ces natures ignobles et sauvages non de généreux ménagements, ni le point d’honneur de bien traiter celle dont le sort d’ici-bas est confié entièrement à leur bienveillance, mais au contraire l’idée que la loi la leur a livrée comme leur chose, pour en user à discrétion, sans être tenus envers elle au respect qu’ils doivent avoir pour toute