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Page:John Stuart Mill - De l’assujettissement des Femmes.djvu/86

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légales du lien qui les unit ; elles vivent et sentent à tous les points de vue comme si elles étaient égales aux yeux de la loi. Elles auraient tort pourtant de croire qu’il en est ainsi de toutes les unions où le mari n’est pas un misérable achevé. Ce serait montrer autant d’ignorance de la nature humaine que de la réalité de la vie. Moins un homme est fait pour la possession du pouvoir, moins il a de chance d’être autorisé à l’exercer sur une personne avec son consentement volontaire, plus il se félicite du pouvoir que la loi lui donne, plus il exerce ses droits légaux avec toute la rigueur que comporte la coutume (coutume de ses pareils) et plus il prend plaisir à employer son pouvoir à raviver l’agréable sentiment de le posséder. Bien plus, dans la partie des classes inférieures où la brutalité originelle s’est le mieux conservée, et la plus dépourvue d’éducation morale, l’esclavage de la femme et son obéissance passive, en instrument inerte, à la volonté du mari, inspire à celui-ci une sorte de mépris qu’il n’éprouve pas pour une autre femme, ni pour toute autre personne, et qui lui fait considérer sa femme comme un objet né pour subir toute espèce d’indignités. Qu’un homme capable de bien observer et à qui les occasions de le faire ne manquent pas vienne nous contredire ; mais s’il voit les choses comme nous, qu’il ne s’étonne pas du dégoût et de l’indignation que