Page:Joly - Dialogue aux enfers entre Machiavel et Montesquieu.djvu/255

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
— 242 —

Montesquieu.

Vous êtes d’une modération accomplie, et vous croyez que ces innovations financières ne jetteront pas l’alarme dans le pays ?

Machiavel.

Pourquoi voulez-vous qu’elles alarment plus que mes autres mesures politiques ?

Montesquieu.

Mais parce que celles-ci touchent aux intérêts matériels de tout le monde.

Machiavel.

Oh ! ce sont-là des distinctions bien subtiles.

Montesquieu.

Subtiles ! je trouve le mot bien choisi. N’y mettez donc pas de subtilité vous-même, et dites simplement qu’un pays qui ne peut pas défendre ses libertés, ne peut pas défendre son argent.

Machiavel.

De quoi pourrait-on se plaindre, puisque j’ai conservé les principes essentiels du droit public en matière financière ? Est-ce que l’impôt n’est pas régulièrement établi, régulièrement perçu, les crédits régulièrement votés ? Est-ce qu’ici, comme ailleurs, tout ne s’appuie pas sur la base du suffrage populaire ? Non, sans doute, mon gouvernement n’est pas réduit à l’indigence. Le peuple qui m’a acclamé, non-seulement souffre aisément l’éclat du trône, mais il le veut, il le recherche dans un prince qui est l’expression de sa puissance. Il ne