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un bras énergique, un pouvoir fort ; ils ne lui demandent qu’une chose, c’est de protéger l’État contre des agitations auxquelles sa constitution débile ne pourrait résister, de leur donner à eux-mêmes la sécurité nécessaire pour qu’ils puissent jouir et faire leurs affaires. Quelles formes de gouvernement voulez vous appliquer à des sociétés où la corruption s’est glissée partout, où la fortune ne s’acquiert que par les surprises de la fraude, où la morale n’a plus de garantie que dans les lois répressives, où le sentiment de la patrie lui-même s’est éteint dans je ne sais quel cosmopolitisme universel ?

Je ne vois de salut pour ces sociétés, véritables colosses aux pieds d’argile, que dans l’institution d’une centralisation à outrance, qui mette toute la force publique à la disposition de ceux qui gouvernent ; dans une administration hiérarchique semblable à celle de l’empire romain, qui règle mécaniquement tous les mouvements des individus ; dans un vaste système de législation qui reprenne en détail toutes les libertés qui ont été imprudemment données ; dans un despotisme gigantesque, enfin, qui puisse frapper immédiatement et à toute heure, tout ce qui résiste, tout ce qui se plaint. Le Césarisme du Bas-Empire me paraît réaliser assez bien ce que je souhaite pour le bien-être des sociétés modernes. Grâce à ces vastes appareils qui fonctionnent déjà, m’a-t-on