Page:Jorga - Histoire des roumains et de leur civilisation, 1920.djvu/101

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de la « Cour », « hânsari », qui vivaient sur le butin comme les « akindschis » turcs, paysans assoiffés de vengeance pour leurs villages détruits et pour la honte répandue dans leurs foyers. Le massacre fut horrible ; le roi lui-même rapporta de cette catastrophe une profonde blessure, une flèche s’étant fichée dans « l’épine de son dos », dit la chronique hongroise.

L’expédition ne fut pas reprise : elle avait coûté trop cher ; on s’empressa de bâcler un bulletin destiné à cacher la triste réalité, et l’Occident offrit bientôt à l’ambitieux « Corvin » des compensations pour cette défaite subie en « pays barbare », aux prises avec un ennemi « perfide ».

De son côté, Etienne n’avait plus rien à réclamer du côté de l’Occident que la tête, qu’il eut bientôt, de son oncle assassin. Poursuivant de nouveau les buts réalistes d’une politique moderne, il chercha, tout en remplaçant les châteaux de bois par de bonnes fortifications en pierres, mises sous le commandement de ses burgraves (pârcalabi), à compléter sa frontière au Sud, du côté de la Valachie. Déjà, son aïeul Alexandre avait eu le district de la Vrancea, district que parcouraient les pâtres de toutes les régions roumaines, mais qui, d’après l’ancienne tradition des évêques cumans établis à Milcov, avaient vécu sous l’autorité des princes valaques. Pour arrêter l’avance des Moldaves, les princes rivaux élevèrent, près de cette ancienne cité épiscopale, détruite par les Tatars, la forteresse de Craciuna, et ils fortifièrent même, probablement à Valenii-de-Munte, le cours du Teleajen, pour opposer une nouvelle barrière à une invasion de leurs voisins.

Mais ce qu’il fallait avant tout, c’était de ne pas laisser le cours du Danube entre les mains des Turcs, représentés alors par leur protégé, le beau Radu. Après avoir infligé une leçon aux bandes des Tatars dévastateurs,