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LA REVISION


étant allé, non aux manœuvres de septembre, mais à un voyage d’État-Major en juin, l’accusation a été d’abord que le bordereau était d’avril ou de mai, et que Dreyfus avait appliqué au voyage d’État-Major le mot de « manœuvres ». Dès que se produisirent, trois ans plus tard, les premières tentatives pour la revision, l’accusation changea de système. On s’était aperçu que les documents visés dans le premier procès « ne pouvaient être sérieusement considérés comme confidentiels » ; une note ministérielle[1] déclarait : « Il n’y a pas un officier de l’armée française qui, partant pour les écoles à feu ou pour faire un voyage d’État-Major, dirait : Je vais partir en manœuvres. » La date présumée du bordereau fut, en conséquence, reportée à la fin d’août, les renseignements fournis portaient « sur des travaux de l’État-Major postérieurs au mois de juillet » ; Dreyfus aurait pu croire, jusqu’à cette époque, qu’il irait aux manœuvres de septembre. Or, d’une part, Dreyfus, ainsi que tous les autres officiers stagiaires, avait été averti, dès le printemps de 1894, qu’il n’irait pas cette année-là aux manœuvres, comme il résulte d’une déclaration du capitaine de Pouydraguin[2]. Interrogé sur ce point par Henry, Pouydraguin lui remit une note « non retrouvée depuis lors ». Et, d’autre part, il a été déclaré, à l’unanimité, par une commission technique de quatre généraux, qu’un officier d’artillerie, commettant un acte de trahison, n’aurait ni employé aucune des expressions grossièrement impropres qui figurent au bordereau, ni, en 1894, présenté comme offrant un intérêt quelconque des renseignements « universellement connus depuis long-

  1. Note du 28 mai 1898 (Revision, II, 492).
  2. Enquête Legrix, 19 avril 1904, déposition de Pouydraguin.