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HENRY


engagea Henry à faire reprendre le dossier par Gonse[1].

Henry, une fois de plus, va si bien suggestionner Gribelin que l’archiviste, plus tard, affirmera qu’il a vu, lui aussi, Picquart et Leblois attablés devant le dossier secret[2].

Le lendemain[3], Gonse rencontra Henry dans l’une des cours du ministère[4] : « Comment cela va-t-il au bureau ? — Cahin caha, répond Henry, le colonel est toujours absorbé par son affaire Esterhazy. — C’est fâcheux, reprend Gonse, parce que les affaires du bureau périclitent un peu. — Et les indiscrétions continuent, observe Henry. — Cela ne me regarde pas », réplique

    d’Henry, mais ajoute « qu’Henry n’indiqua pas si c’était le jour même, ou la veille, ou l’avant-veille « : Lauth a intérêt à n’avoir pas conféré avec Henry à la veille de la fabrication du faux. En tous cas, Henry et Gribelin déclarent tous deux « qu’ils ont vu, fin octobre, Picquart et Leblois compulser le dossier secret ». (Procès Zola, I, 363 ; Instr. Fabre, 19 ; etc.) À l’enquête Pellieux, à l’instruction Ravary, au conseil d’enquête du 1er février 1898, Henry dit et maintient que « le fait se passa un peu après sa rentrée de permission ». (Cass., II, 156.) Or, il rentra de permission le 17 septembre, et Leblois ne rentra à Paris que le 7 novembre.

  1. Instr. Fabre, 20, Gribelin ; 31, Lauth, etc.
  2. Gribelin « jure devant Dieu qu’il les a vus ». (Procès Zola, I, 159 ; Instr. Fabre, 19.) Selon Leblois, quand il vint voir Picquart au ministère, du 9 au 13 novembre 1896, Gribelin ne serait même pas entré dans la chambre (I, 159).
  3. La chronologie de cette fin de semaine est déterminée par trois dates : l’une approximative, la visite de Lauth au bureau, que Picquart place au 29 ou au 30 octobre ; la deuxième, certaine, le rapport de Guénée, qui est daté du 30 octobre (à moins, ce que je ne crois pas, que le rapport ait été fabriqué après coup) ; la troisième est celle de la communication du faux à Gonse, qui eut lieu, selon Gonse, le lundi 2 novembre. — Il importe peu que la visite de Lauth au bureau, le rapport de Guénée et la conversation d’Henry avec Gonse soient du même jour (le 30), ce qui serait fort possible, ou s’échelonnent, ce qui paraît plus vraisemblable, sur le 29 et le 30.
  4. Cass., I, 252, Gonse.