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HENRY


Lauth était réellement absent, et n’était qu’en sous-ordre au bureau ; pourtant, dès son retour, Henry lui raconta sa découverte, une pièce « extraordinaire », et lui en fit la description[1].

Gonse, le jour même, porta le faux à Boisdeffre[2]. Depuis deux ans, le chef de l’État-major répétait, sans cesse, « qu’il fallait corser le dossier[3] ». Pourtant,

    niquait directement avec vous ? — Henry, répond Gonse, n’a correspondu directement avec moi que pendant deux ou trois jours de l’absence de Picquart. À son retour, Picquart a repris son service jusqu’au moment de son départ définitif ; et, comme la pièce était arrivée pendant son absence et que son départ était décidé, il n’a pas été jugé à propos de lui en parler. » — Boisdeffre fait le même mensonge : « Picquart étant absent pour une mission de courte durée ». (Cass., I, 263 et Rennes, I, 527.) — Picquart établit que cette absence qu’il aurait faite alors est de pure invention. (Lettre du 13 avril 1899 au premier Président de la Cour de cassation et Rennes, I, 453.) Il dit qu’il a vu Gonse tous les jours à cette époque et que, le 1er  novembre, notamment. « bien que ce fût un jour férié », il avait donné rendez-vous, au bureau, à un agent « qu’il pourrait nommer ». L’agent se nomma lui-même à Rennes : le commissaire spécial Tomps, qui déposa que, le 29 octobre, Picquart l’envoya en mission à Bâle avec Vuillecard et Geiger, qu’il rentra le 31 à Paris et que, le 1er  novembre, il toucha son argent à la section de statistique et conféra avec Picquart et le capitaine Maréchal. (Rennes, III, 363.) — Gonse, dans sa lettre du 13 mai 1899 au premier Président, maintient que « Picquart s’absenta du samedi 31 octobre, dans l’après-midi, jusqu’au 3 novembre » ; il dit qu’il a vérifié les dates et que Gribelin en pourrait déposer. (Cass., II, 353.) — Cela est faux, mais ce serait vrai que le cas de Gonse n’en serait pas meilleur. En effet, il eût pu montrer à Picquart, le 3 novembre, la pièce qu’Henry lui avait remise la veille. — Lauth (Rennes, I, 627) dit également que Picquart était absent pour deux ou trois jours.

  1. Rennes, I, 633, Lauth.
  2. Cass., 1, 341, Cuignet : « Gonse, avant tout un soldat discipliné, ne crut pas devoir garder par devers lui la pièce sans la montrer au moins à Boisdeffre. » — Rennes, I, 556, Boisdeffre : « C’est le 2 novembre que le général Gonse m’apporta la pièce qu’on a appelée le faux Henry. »
  3. Dép. à Londres, 26 février 1900 : « Il n’y a pas d’autre manière, dit Esterhazy, de corser un dossier que d’y mettre des