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SCHEURER-KESTNER


des décalques, toutes pièces provenant du ministère de la Guerre. Comme Scheurer manifestait quelque surprise, l’expert lui conta quelques-uns de ses mensonges habituels : ce dossier a été déposé chez lui, le 16 novembre 1896, par un visiteur inconnu ; mais c’est Bertillon, de son propre aveu, qui a communiqué le fac-similé au Matin ; Teyssonnières en a informé le procureur de la République ; en 1894, son rapport accusateur avait été mal vu à la préfecture de police, hautement approuvé au ministère de la Guerre : « Enfin, lui avait-on dit, voilà un honnête homme ! » Aussi, les Juifs le poursuivaient de leur haine.

Enfin, il lui fit une démonstration graphique qui, sur le moment, parut probante. De nouveau, Scheurer se sentit soulagé, remercia l’expert[1] ; Dreyfus était coupable. Mais, le lendemain, il procéda à une nouvelle étude des textes, et toute la démonstration de Teyssonnières s’écroula[2]. Il le pria alors de revenir[3], discuta avec lui. L’expert parut très troublé[4].

Scheurer vit aussi Demange[5], qui lui parla longuement, avec émotion, mais qui ne le convainquit pas encore. Depuis qu’il avait reçu les confidences de Salles, il méditait de saisir le garde des Sceaux d’une demande

  1. Procès Esterhazy, 148 ; Procès Zola, II, 23, Scheurer. — Cass., I, 504, Teyssonnières.
  2. Mémoires de Scheurer.
  3. 11 juillet. — Procès Zola, I, 448, Teyssonnières ; II, 23, Scheurer : « Je m’absentai pour quelque temps (il retourna en Alsace où il eut sa seconde entrevue avec Bertin) et, lorsque je revins à Paris, le trouble était si grand chez moi que je priai Teyssonnières de revenir. »
  4. Mémoires de Scheurer.
  5. Teyssonnières prétendit, au procès Zola (I, 447), que Demange était venu chez Scheurer et qu’il tenait le fait de ce dernier. Scheurer (II, 23) déclara que ce fut lui-même qui alla chez Demange ; Bernard Lazare l’accompagna et assista à la conversation.


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