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HISTOIRE DE L’AFFAIRE DREYFUS


Plus que jamais, il resta lié avec Weil. Celui-ci, très versé, lui aussi, dans les questions militaires, avait entrepris, sous les auspices du ministère de la Guerre, des études historiques et critiques, très prisées des techniciens. Il y avait contre lui, à l’État-Major, un dossier qu’on disait terrible[1] ; Morès l’accusa vaguement d’espionnage[2]. Déféré sur ces entrefaites à un conseil d’en-

    de l’artillerie ? » Curé me dit encore qu’Esterhazy faisait constamment copier des documents chez lui.» — De même, Cass., II, 88, et Rennes, I, 421. — Toute cette partie de la déposition de Picquart est confirmée par Curé. (Cass., I, 407 ; Rennes, II, 239.) — Cass., I, 617, capitaine Le Rond : « Je l’ai remarqué (à Châlons, en 1894, aux écoles à feu), comme intelligent, d’esprit alerte et curieux, très désireux de s’instruire sur une arme qui n’était pas la sienne et posant, pour cela, des questions de détail sur le matériel ou le service des pièces. « — Le Rond ajoute qu’Esterhazy lui demanda, par lettre, en juillet 1895, des éclaircissements « qui témoignaient d’une absence de compétence notoire en artillerie ». Mais « cette ignorance sert de prétexte à la demande d’un ouvrage fournissant tous renseignements utiles sur le feu de l’artillerie ». (Cass., III, 424. Mornard.) En effet, « il demande s’il ne pourrait pas trouver dans le commerce un livre traitant des effets du feu de l’artillerie, analogue à ceux qu’ont publiés le général Philbert et le colonel Pâquier sur les effets du tir de l’infanterie ». (Cass., I, 81, Roget.) — Rennes, II, 141, lieutenant Bernheim : « Au café (à Rouen, en août 1894), Esterhazy me parla de l’intérêt qu’il portait au tir de l’infanterie et de l’artillerie, et qu’il serait très heureux d’avoir un livre sur le tir. » — Instr. Tavernier, 28 sept. 1898, Picquart : « Le colonel de Foucault, attaché militaire de France à Berlin, me dit que Cuers lui avait affirmé ce qui suit : que l’État-Major allemand n’avait qu’un espion, un commandant âgé d’environ cinquante ans ; il ne nous a jamais rien donné de fameux ; c’était surtout des affaires d’artillerie. Schlieffen n’en a plus voulu ; on l’a remercié un moment, puis il a recommencé à fournir. Dans les derniers temps, il a donné des questions de tir, des cours de l’École de tir de Châlons. »

  1. Cass., I, 153, Picquart.
  2. Cass., I, 153, Picquart. — Morès, dans la Libre Parole du 2 mai 1892, ne précise rien ; il met en garde les patriotes « contre un nommé Weil, un escroc juif, qui a ses grandes et petites entrées dans la Défense nationale ». Le 14, l’Avenir militaire