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L’ACQUITTEMENT D’ESTERHAZY


révocable. Nous attendrons, forts de notre conscience, la juste, l’inévitable réparation[1].

Trarieux, dans une lettre à Billot, protesta contre le simulacre de justice qui se préparait. De Picquart, on ne savait encore que les calomnies dont il avait été abreuvé ; Trarieux raconta comment Picquart avait découvert l’innocence de Dreyfus et comment il en avait été puni[2]. Mathieu révéla les démarches du contrôleur général Martinie, au nom de Billot[3].

Grand symptôme d’un prochain réveil des cœurs : pour la première fois, des femmes[4] ont fondé un journal et, tout de suite, au-dessus des passions, font entendre la voix de la Pitié.

Comme en 1894, il restait à la victoire du Mensonge un dernier obstacle : La publicité du débat. Si le témoignage de Picquart n’est pas étouffé sous le huis clos, l’acquittement devient impossible ou trop honteux. Pour savoir de quel côté est la vérité, il suffit de regarder qui demande la pleine lumière[5] et qui en a peur. À leur ordinaire, les paladins de profession agitèrent le spectre de l’étranger, les susceptibilités inquiètes de l’Allemagne. Or, toute la presse allemande affirmait que nulle objection ne viendrait de Berlin à un débat au grand jour[6] ».

  1. Temps du 5 janvier 1898.
  2. Temps du 6.
  3. Siècle du 5.
  4. Marguerite Durand. Clémence Rover, Séverine. Mme Constant Bradamante, Daniel Lesueur, Hélène Sée, etc. — Le premier numéro de la Fronde parut le 9 décembre 1897.
  5. Ranc, Jaurès, Lacroix, Yves Guyot, Clemenceau, L, V. Meunier, etc., auxquels se joignirent Cornély et Cassagnac.
  6. Gazette de Cologne, Gazette de l’Allemagne du Nord, Post, etc. du 5 janvier : tous les journaux publient la même note officielle : « Si le capitaine Dreyfus a trahi, ce ne peut être qu’en