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HISTOIRE DE L’AFFAIRE DREYFUS


léologue, écrivit sous sa dictée le texte de la version authentique ; puis, tranquillement, ayant encore la copie en poche ou l’ayant détruite en route, retourna chez Gonse : « Ces messieurs, lui dit-il, n’ont pas voulu me donner le télégramme[1]. » Il crut encore que l’affaire en resterait là.

Gonse, comme de juste, rapporta cette réponse à Boisdeffre et à Billot. Boisdeffre ne voulut rien savoir ; mais Billot dit qu’il s’en chargeait, que lui-même, au prochain conseil des ministres, il demanderait à Hanotaux la copie de la dépêche, à titre personnel[2].

C’était, d’ailleurs, le plus sûr moyen de ne rien avoir. Hanotaux, en effet, fit à Billot la même réponse que Paléologue à Henry : que les affaires d’État ne se traitent point ainsi, à l’amiable ; qu’il en existe un sage protocole ; qu’en particulier, « cette affaire a été déjà réglée et qu’elle ne saurait faire l’objet de communications personnelles, si confidentielle ? qu’elles puissent être[3] ».

On ne voit pas qu’Hanotaux, à l’exemple de Paléologue, ait suggéré à Billot de réclamer officiellement la dépêche. Cette affaire l’ennuyait beaucoup. Il avait eu de grosses difficultés avec l’ambassadeur d’Italie. Il en aurait de nouvelles si celui-ci, par quelque indiscrétion, apprenait que les dépêches de Panizzardi avaient été interceptées.

D’autre part, Billot s’obstina, soit qu’il eût quelque

  1. Cass., I, 391, Paléologue ; 557, Boisdeffre ; 363, Gonse.
  2. Ibid., I, 557, Boisdeffre.
  3. Ibid., I, 556, Billot. — D’après Boisdeffre (I, 557). Hanotaux aurait simplement refusé la communication pour des raisons de convenance diplomatique. De même Gonse (I, 562). Paléologue n’a connu la démarche que par un récit de Gonse (I, 392). Hanotaux, dans sa déposition, passe l’incident sous silence.