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HISTOIRE DE L’AFFAIRE DREYFUS

Donc, Cuers est un misérable, indigne de toute créance, quelque agent à la solde ou de l’État-Major prussien ou du Syndicat juif.

Coup d’une admirable audace et qui porta fortement.

Du moment qu’il se trouve des hommes assez pervers ou assez fous pour accuser Henry, quoi d’étonnant qu’il s’en trouve pour accuser Esterhazy, viveur endetté et imprudent…?

Ces contradictions d’un agent étranger, qui tantôt nomme Henry, tantôt semble désigner Esterhazy, prouvent à la fois et l’inanité de ses dénonciations et l’intérêt des Allemands à disculper Dreyfus.

Si Cuers, initié aux mystères du fameux Thiergarten, a vraiment signalé Henry comme l’informateur d’Esterhazy, cette allégation (qui aurait pu être redoutable), maintenant qu’Henry la révèle lui-même, ne pèse plus rien.

Henry eût pu taire cet incident à Pellieux. Ah ! l’honnête homme qui fonce sur la calomnie ! Le témoignage d’un tel soldat est « inattaquable[1] ».

Les premiers propos de ce misérable Cuers, qui paraissaient viser Esterhazy, Picquart, naturellement, les a accueillis.

Henry dut charger son ancien chef de l’air d’un soldat qui accomplit, dans un intérêt supérieur, un pénible devoir. Et Gribelin, Lauth vont confirmer tous ses mensonges. Et, eux aussi, ce sont des hommes honorables.

Ces accusations qui vont se préciser, en se renouvelant, de vagues devenir formelles, s’accroî-

  1. C’est ce que dira encore Pellieux à l’instruction Fabre : « Leur honorabilité (d’Henry et de Gribelin) rend leur témoignage inattaquable. »