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HISTOIRE DE L’AFFAIRE DREYFUS


dossiers qui intéressaient la défense nationale[1].

Ainsi Henry continuait à se survivre. Dix fois, on avait confondu ses mensonges. Ils revenaient. Au Cherche-Midi, à la Cour de cassation, Tavernier, Zurlinden, Gonse, Roget, Cavaignac répétaient Henry.

VII

Freycinet connut le rapport de Tavernier[2], les conclusions conformes du rapporteur Foulon. L’esprit le plus clair du monde, capable sans efforts de tout comprendre, il eut horreur de cet amas de bas racontars et de ce qu’on y avait soudé de sottes déductions. La vengeance, la haine, une volonté plus profonde, tenace, de frapper Dreyfus à travers Picquart et de faire obstacle à la Cour de cassation, lui apparurent. Son droit, dont il n’avait pas usé une première fois, d’arrêter la poursuite[3], demeurait formel, même après « l’avis du rapporteur et les conclusions du commissaire ». Il était pareillement inscrit dans l’exposé de ce Code de justice militaire, qui avait attribué aux généraux de tels pouvoirs que le Corps Législatif de l’Empire les trouva lui-même exorbitants. Encore une fois, Freycinet pouvait exercer ce droit, dans les « circonstances exceptionnelles » que la loi avait prévues et qui se réalisaient.

  1. Rapport du 19 novembre 1898. (Affaire Picquart, 281 à 300.)
  2. Le Gaulois en avait, depuis plusieurs jours, publié une analyse fort exacte. (7 novembre.)
  3. Code de justice militaire, exposé des motifs : « Il y a des circonstances exceptionnelles, très exceptionnelles ; sans doute, où le devoir commande d’arrêter une poursuite. »