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MORT DE FÉLIX FAURE


l’avait fallu », toute sa compromettante paperasse[1].

Il était alors environ six heures et, les derniers braillards s’étant dispersés après avoir fait encore quelque tapage et réclamé Déroulède sur l’air des lampions, tout était rentré dans l’ordre. Florentin et Roget, qui étaient également ennuyés de cette histoire et qui trouvaient d’ailleurs « l’attentat plus théorique que pratique[2] », députèrent aussitôt Kerdrain aux deux prisonniers « pour les prévenir qu’ils pouvaient s’en aller ». Ils répondirent, « qu’ils voulaient rester arrêtés »[3], et force fut bien à Roget d’envoyer un rapport à Zurlinden[4]. Il le fit le plus édulcoré qu’il pût, bien qu’à raconter exactement les choses, il se serait beaucoup moins compromis qu’en les atténuant. Mais, précisément, ce qui lui pesait, c’était de n’avoir point failli à son honneur de soldat et il s’inquiétait des reproches que lui vaudrait sa loyauté. La visite d’un ancien collaborateur[5] de Rochefort, qui était devenu celui d’Arthur Meyer et qui avait fait partie de la bande des manifestants, ajouta à ses perplexités. Il l’autorisa à communiquer avec les députés[6] et, lui-même, se rendit à la salle où ils venaient de dîner et leur demanda, en présence du journaliste, comme l’avait fait précédemment

  1. Instr. Pasques, 31, Déroulède. — Cour d’assises de la Seine, 31 mai 1899, Falateuf ; « Ces noms, ces adhésions, on ne les connaîtra jamais… Déroulède ne parlera pas. »
  2. Cour d’assises, 29 mai 1899, Florentin.
  3. Instr. Pasques, 18, Kerdrain. — Cet incident est passé sous silence par Roget et par Florentin.
  4. Ibid., 15, Roget. Florentin adressa de son côté un rapport à Zurlinden sur les incidents auxquels il avait été mêlé.
  5. Maurice Talmeyr.
  6. Instr. Pasques, 15, Roget : « Je n’avais aucune raison pour mettre MM. les députés au secret. » Un peu plus tard, comme d’autres visiteurs se présentèrent, » il interdit absolument l’entrée de la caserne ».