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HISTOIRE DE L’AFFAIRE DREYFUS

Plusieurs, qui désapprouvaient l’opération, la couvrirent publiquement.

Ainsi, en moins d’un an, le petit parti de la justice avait perdu trois de ses principaux champions : Scheurer, malade ; Picquart, en prison ; Zola, en exil. Mais tel était son élan qu’il ne se retourna même pas pour voir emporter les prisonniers et les blessés.

VIII

De quelques périls accrus qu’Henry fût environné et bien qu’il se fût usé par tant d’angoisses, il n’était pas homme à ne pas lutter jusqu’au bout. Il décrocha, brandit son bouclier : Du Paty.

On l’a vu, dès le début de l’Affaire, en 1894, s’effacer derrière Du Paty, lui laisser la gloire de la condamnation de Dreyfus. Il avait continué ensuite à jouer de lui comme d’un pantin, le mêlant à nombre de ses intrigues, ourdissant et combinant ses autres manœuvres, celles où Du Paty fut le plus étranger, de façon à ce que tout parût l’accuser le jour où elles seraient découvertes, et ne manquant qu’un seul coup, celui de se faire remplacer par lui au service des Renseignements. Jamais araignée n’a tissé dans l’ombre un réseau plus inextricable. Et il y avait longtemps que la misérable mouche s’y débattait, sans soupçonner par qui tous ces fils avaient été tendus.

Du Paty, par son véritable crime, les procédés de tortionnaire décadent qu’il avait mis en œuvre contre Dreyfus, s’était désigné lui-même aux haines. Son obstination, après le procès Zola, à contester l’authenticité de la lettre de Panizzardi, ne lui fut pas moins