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DÉFENSE RÉPUBLICAINE

Il s’était engagé, comme on l’a vu, à rechercher les fauteurs du coup d’Auteuil, machiné, concerté, selon lui-même. Il n’en fit rien. Nulle perquisition aux ligues, bien qu’il sût la part qu’elles avaient prise à la préparation de la bagarre[1], ni chez leurs bailleurs de fonds (Castellane et Archdeacon), bien que la police les eût tout deux signalés[2] ; et nulle instruction plus molle. Sur cent et quelques individus qui, tous, avaient été arrêtés en flagrant délit, et qui eussent été tous retenus s’ils avaient été mal vêtus, le juge Lemercier n’en garda que huit, et pour les prévenir seulement de rébellion aux agents, ce qui équivalait à supprimer le délit d’outrage au Président de la République. L’un fut acquitté[3], les autres condamnés à quelques semaines de prison et à des amendes dérisoires[4]. Pour Christiani, inculpé « de coups portés à un magistrat dans l’exercice de ses fonctions », il eut quatre années d’emprisonnement[5].

Les violences, les défis continuèrent. Lasies, dans le journal de Drumont, poussait directement à la révolte : « Allons, soldats, citoyens, tous debout !… Les généraux n’ont plus le droit de se taire[6]. » Mercier, avec

  1. Haute Cour, I, 26, rapport Hennion (5 et 6 juin 1899).
  2. Ibid. — On ferma, pour quelques jours, deux petits cercles qui n’étaient pour rien dans l’affaire d’Auteuil.
  3. Langlois de Neuville.
  4. De Dion et d’Aubigny à quinze jours, Félix Barrio à un mois, Louis Barrio à deux mois, de Maulny et de Meyronnet à trois mois de prison ; de Frémencourt à 200 francs d’amende (16 juin 1899). Krantz infligea une simple punition disciplinaire aux officiers qui s’étaient fait prendre et qu’il eût dû renvoyer devant un conseil d’enquête.
  5. 13 juin.
  6. Libre Parole du 6. — Krantz déféra Lasies, qui était officier de réserve, à un conseil d’enquête (7 juin) ; le conseil, présidé par le général de Chalendar, « fut d’avis », qu’il n’y avait lieu ni de révoquer ni de suspendre Lasies de son grade.