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RENNES


avait appartenu au 2e bureau, et que ce pouvait être Dreyfus ». Il ne sait pas ce que contenait le pli fermé et scellé que Sandherr l’a chargé de remettre à Maurel ; il ne sait rien d’une notice biographique sur Dreyfus ; il n’a pas été à même de vérifier « si le texte chiffré, reconnu pour authentique », de la dépêche Panizzardi présentait la même particularité inquiétante que le texte chiffré « qu’il a vu ». La dernière parole que lui a dite Dreyfus au Cherche-Midi, ce fut : « Cherchez ! » Cri d’un innocent. Mais Gonse et Sandherr, quelques jours après, lui ont appris que Dreyfus avait fait des aveux : « Dès lors (donc, en raison seulement de l’affirmation de Sandherr et de Gonse), je considérai cette affaire comme absolument terminée. » Enfin, il n’a pas été le « tortionnaire » dont la hideuse et grotesque légende le poursuit, et il n’en veut pour preuve que des lettres de Mme Dreyfus qu’il a conservées.

À l’audience, tout ce savant édifice fût tombé en poussière, l’écrasant, écrasant ses employeurs et ses associés.

Weil, de même, préféra être malade : Beauvais demanda qu’on recherchât son dossier[1] ; Brogniart, sur la foi de Roget et de Billot, le croyait le trait d’union entre Esterhazy et Dreyfus[2]. Il n’osa même pas protester par lettre qu’il n’avait jamais connu Dreyfus, qu’il avait eu seulement le malheur d’être l’ami et le prisonnier d’un bandit.

Quiconque faisait usage seulement de sa raison ne

  1. Rennes, II, 295, Beauvais.
  2. Ibid., III, 94, Brogniart : « Pensez-vous qu’il ait connu l’accusé ? » Le lieutenant-colonel Guérin répond qu’il n’en sait rien. « J’affirme, intervient Dreyfus, que je n’ai jamais connu la personne dont on vient de citer le nom. » — Roget nomma Weil (I, 292). Billot dit seulement : « Cherchez dans telle et telle direction s’il n’y aurait pas un lien. » (III, 489.)