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HISTOIRE DE L’AFFAIRE DREYFUS


Nancy en compagnie de l’officier étranger qu’il était allé chercher à Nice et qui s’entretint quelques instants avec Mareschal avant de continuer sa route sur Metz. Mareschal installe Wessel dans un hôtel, le rassure contre tout danger d’extradition, lui confie diverses missions sur la frontière[1]. La conversation tombe sur l’affaire Dreyfus ; Wessel raconte que Przyborowski a procuré Cernuski à l’État-Major, et qu’il en bavardait beaucoup[2]. C’était exactement ce que Mathilde disait à l’agent niçois et écrivait à Tomps.

Ici, selon Wessel, Mareschal se serait montré « subitement surexcité ». « Przyborowski, lui aurait-il dit, n’a qu’à se tenir ; sans quoi, je le fais arrêter. » Il demande alors à Wessel de signaler dans un rapport que Tomps a offert de l’argent à Przyborowski pour dire que « c’est lui qui a procuré Cernuski et son témoignage ». Wessel, qui sait par Mathilde que c’est le Polonais qui a cherché à rentrer en relations avec Tomps, hésite d’abord à mentir ; mais Mareschal lui promet une gratification et Wessel consent à dénoncer Tomps[3].

Nécessairement, Mareschal contredit Wessel. C’est Wessel qui lui a confié « spontanément[4]. » que Tomps s’occupait à obtenir du Polonais un faux témoignage sur Cernuski. Il convient pourtant qu’il a conduit Wes-

  1. Procès-verbal dressé par Boissière, commissaire central de Nice, constatant les déclarations de Wessel. (4 mai 1900.)
  2. Procès Dautriche, 176, François ; 214, Mareschal ; 548, Wessel.
  3. Déclaration de Wessel, du 4 mai 1900.
  4. Le rapport de Wessel, daté de Nancy, le 10 mars 1900, débute ainsi : « On trouvera ci-après quelques déclarations que je fais à M. Weiss (pseudonyme de Mareschal) et qui auront sans doute de l’intérêt pour des raisons qui me sont particulières. Je tiens à déclarer en même temps que je n’ai été poussé par personne, ni d’aucune manière, à faire ces déclarations qui sont absolument spontanées. » — On ne rédige pas ainsi une déclaration spontanée.