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HISTOIRE DE L’AFFAIRE DREYFUS


par tous les moyens à « la reprise de l’Affaire », et la fièvre de l’Affaire, au même instant, les a tous repris.

Humbert et Le Hérissé abordent Galliffet, lui mettent sous les yeux les photographies des lettres de Tomps. Galliffet, qu’on ne démonte pas aisément, en perd ses étriers. Il prévient Waldeck-Rousseau qui, déjà, à peine rentré au ministère de l’Intérieur, lui a écrit d’ouvrir une enquête.

Il suffira d’une heure, le lendemain, pour avoir l’explication de l’énigme.

Hache et de Lacroix, quand François leur a montré les lettres, les ont trouvées sans importance ; Delanne s’est contenté de leur affirmation ; tout comme Galliffet, il les voit aujourd’hui, dans le cabinet du ministre, pour la première fois ; les eût-il connues, en aurait-il rendu compte ? Galliffet a défendu qu’on lui parlât de l’Affaire ; sa consigne a été aussi scrupuleusement observée en haut qu’elle a été violée systématiquement en bas.

De qui Le Hérissé tient-il la photographie des lettres ? Fritsch, interrogé par Delanne, avoue : « J’ai commis un acte politique. » Delanne lui reproche sa faute ; Fritsch s’étonne, puis comprend : « J’ai commis un acte de folie », et il fond en larmes[1].

Aucune autre solution que de sévir et de dire la vérité aux Chambres. Fritsch est mis en retrait d’emploi, Tomps déplacé, envoyé à Orléans, malgré l’insignifiance de la faute ; mais il faut à l’opinion l’apparence d’une justice distributive.

Ces carrières d’officiers brisées, perdues pour le service du pays, inspiraient à quiconque n’était pas

  1. Sénat, séance du 25 mai 1900 ; Chambre des députés, séance du 28, discours de Galliffet.