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HISTOIRE DE L’AFFAIRE DREYFUS


Convaincu maintenant de l’innocence de Dreyfus, André le fut aussi, à partir de cet incident, de la déloyauté qui avait présidé, du premier au dernier jour, à la confection du dossier secret. La pièce mensongère, dont il avait été dupe pendant une heure, datait du ministère Freycinet (20 novembre 1898). Rollin et Cuignet l’avaient établie après avoir regardé rapidement au paquet des documents saisis chez Dreyfus ; ils crurent « constater » que le cours de l’École de guerre n’était pas au complet et conclurent aussitôt que c’était le même qui avait été copié par d’Arco[1]. S’étant aperçus de leur erreur quelque temps après, ils en avaient bien informé Freycinet qui prescrivit d’en rendre compte à la Cour de cassation, ce qui fut fait par Chamoin ; mais ils avaient maintenu au dossier secret leur procès-verbal qu’ils savaient faux et sans y ajouter de note rectificative. Enfin, à Rennes, Rollin avait déposé qu’il manquait un certain nombre de pages au cours de fortifications[2], alors que c’était lui-même « qui avait retrouvé le cours complet[3] », et Cuignet « n’avait point considéré comme un devoir de conscience » de prévenir le conseil de guerre qu’il ne fallait tenir aucun compte de la note du 20 novembre[4]. Seul, Chamoin avertit les juges, dans une audience à huis clos, « que le manuscrit de d’Arco n’était pas la copie du cours saisi chez Dreyfus[5] ».

    lin. — Gribelin renouvela sa déclaration par écrit le 17 octobre suivant. (Mémoire Mornard, 186, et Cass., IV, 210.)

  1. Cour de cassation, 14 mai 1901, Cuignet.
  2. Rennes, II, 13, Rollin.
  3. Cass., 14 mai 1904, Cuignet.
  4. Ibid.
  5. Rennes, III, 738, Demange, et Cass., IV, 210, Baudouin. — Une note de Chamoin, du 19 septembre 1899, qui résumait sa déclaration, avait été mise par lui » dans le scellé contenant les