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HISTOIRE DE L’AFFAIRE DREYFUS


rien dit et parce qu’il ne regardait pas au « Journal de Caisse » ou qu’il n’y jetait qu’un coup d’œil distrait, c’est que tout le temps qu’il avait dirigé le service, comme précédemment sous Sandherr, depuis le procès de Dreyfus, Val-Carlos avait été porté au registre pour une mensualité de 400 francs[1]. Il y était inscrit sous les initiales V. C.[2] ou sous le nom de « Vésigneul[3] », qui était celui d’une petite commune des environs de Pogny, le village natal d’Henry, et la mensualité fut continuée, après le départ de Picquart et jusqu’à la dénonciation d’Esterhazy par Mathieu Dreyfus. Il ne la touchait d’ailleurs point lui même ; Gribelin, qui, pas plus que Picquart[4] ou Gonse[5], ne l’avait jamais vu, remettait tous les mois les 400 francs à Henry[6]. Or, Henry, qui ne pouvait pas supposer que ces mensualités fussent ignorées de Picquart, s’était inquiété du parti qu’en tirerait éventuellement son ancien chef (novembre 1897). Que Boisdeffre ou Mercier, ou lui-même, au cours des événements qui se préparent, soit amené à parler du haut personnage, du gentilhomme dévoué et désintéressé, qui leur a signalé Dreyfus[7] ; que Picquart réplique qu’il existe, au ministère, un registre où cet ami de la France est inscrit,

  1. Rapport du contrôleur général Crétin, du 4 novembre 1903, au ministre de la Guerre. (Cass., IV, 40 et suiv.)
  2. De décembre 1894 à mai 1896.
  3. De juin 1896 à octobre 1897.
  4. Cour de cassation, 7 mai 1904, Picquart.
  5. Ibid., 22 mars 1904, Gonse. — Gonse ajoute qu’il a vu pour la première fois Val-Carlos, le jour de sa déposition, dans la salle d’attente de la Chambre criminelle, et sans savoir qui était le personnage qui attendait en même temps que lui. — Même déclaration de Gribelin (11 juin 1904).
  6. Ibid., 21 mars et 11 juin 1904, Gribelin.
  7. Ce qu’ils feront, en effet, à Rennes (I, 84, Mercier ; 147, Cavaignac ; 495, Cuignet ; 518, Boisdeffre ; III, 575, Carrière.)