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LA REVISION


avec peine perpétuelle pour le juif ; puis, encore, une loi spéciale de déportation, lui affectant, pour lui seul, un rocher où il n’aura pas de successeur[1] ; un droit pénitentiaire spécial : la déportation, peine politique, devenant réclusion, peine de droit commun[2] ; un règlement spécial, pour empêcher sa femme de le rejoindre[3] ; et une loi spéciale de dessaisissement.

Voici maintenant la contre-partie. Ce juif, deux fois condamné pour avoir vendu son pays, exclu si longtemps du droit commun des autres Français et comme exclu de l’humanité, puis, tout à coup, devenu l’objet de l’un des plus magnifiques combats qu’un peuple ait jamais livrés pour la justice, il a le mépris de l’argent, le sens exact de la loi et le sentiment « chevaleresque » de l’honneur[4].

Dreyfus ne s’est laissé troubler ni par les criailleries des nationalistes ni par les remontrances de Clemenceau et de Picquart l’invitant à fermer enfin l’oreille « à ces champions timorés de la vérité et du droit », Mornard, Demange et moi, qui tiennent pour la suprématie de la justice civile, et à réclamer un troisième

    lite, a-ton ainsi qualifié les faits ? C’est que la loi de 1866 édicte une peine temporaire, et qu’on voulait pour l’officier juif l’application d’une peine perpétuelle. On a donc qualifié crime ce que la loi qualifiait délit, afin de substituer à la peine d’emprisonnement temporaire édictée par la loi de 1866, la peine perpétuelle de la déportation prévue par l’article 76 du Code pénal. » (Revision, II, 423, Mornard). — Affaires Blondeau, Wanauld, Muhlberg, Bonnet, Theyssen, Turpin, Aurilio, Millescamps, Guillot, Greiner. (Mémoire Mornard, 688. — Cf. Garraud, Traité de droit pénal, II, 525, et arrêt de la Cour de cassation du 23 janvier 1896.)

  1. Loi du 9 février 1895. — Voir t. I, 487.
  2. Voir t. II, 127.
  3. Voir t. II, 180.
  4. Revision, II, 419 et Mémoire Mornard, 691.