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HISTOIRE DE L’AFFAIRE DREYFUS


tion de culpabilité qui doit au contraire faire place à une présomption d’innocence, puisque de la pièce 371 ainsi rétablie, il appert que, pendant l’année 1894, où a été écrit le bordereau incriminé, l’agent B recevait « beaucoup de choses très intéressantes » d’un informateur qui n’était pas Dreyfus.

Sur le moyen tiré de la falsification de la pièce 26 :

Attendu que, devant le conseil de guerre de Rennes, a été produite une lettre de l’agent B à l’agent A portant à l’angle inférieur gauche, de la main du lieutenant-colonel Henry, la mention « Je vous annonce que j’aurai l’organisation des chemins de fer » ;

Attendu qu’il a été fait usage de cette pièce pour soutenir que l’accusé était l’auteur du bordereau incriminé, par le double motif que, d’une part le texte de ce document décelait un officier d’artillerie stagiaire à l’État-major de l’armée et que, d’autre part, le service des chemins de fer dépend du quatrième bureau, où Dreyfus, attaché à la section technique la plus importante au point de vue des transports stratégiques, avait passé de juillet 1893 à janvier 1894, six mois pendant lesquels, au dire de plusieurs de ses camarades, il s’était efforcé d’acquérir et avait, en effet, acquis une connaissance approfondie de l’organisation militaire des chemins de fer français ;

Attendu qu’aux yeux de l’accusation cette pièce avait une telle importance qu’entendu comme témoin à Rennes, le général Mercier avait été logiquement amené à déclarer qu’elle avait, en décembre 1894, figuré dans le dossier secrètement communiqué au conseil de guerre de Paris ;

Mais, attendu qu’en s’exprimant ainsi, il avait commis une erreur qu’a fait ressortir la nouvelle enquête de la Chambre criminelle et que lui-même a reconnue dans une déposition du 26 mars 1904 ;

Qu’il est constant que la pièce 26 n’a pas été présentée au conseil de guerre de Paris ;

Qu’aucun des officiers du service des renseignements ne s’est rappelé l’avoir vue à cette époque ;