Page:Joubert - Pensées 1850 t1.djvu/219

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bien fait, prompt à s’élever au sublime ; une flexibilité longue que n’a desséchée aucun pli ; l’amour des plaisirs innocents, les seuls qu’on ait longtemps connus ; la facilité d’être heureux, par l’habitude où l’on vécut de trouver son bonheur en soi ; je ne sais quoi de comparable à ce velouté des fleurs qui furent longtemps contenues entre des freins inextricables, où nul souffle ne put entrer : un charme qu’on porte en son âme et qu’elle applique à toutes choses, en sorte qu’elle aime sans cesse, qu’elle a la faculté d’aimer toujours ; une éternelle honnêteté ; car il faut ici l’avouer, comme il faut l’oublier peut-être : aucun plaisir ne souille l’âme, quand il a passé par des sens où s’est déposée à loisir et lentement incorporée cette incorruptibilité ; enfin, une telle habitude du contentement de soi-même, qu’on ne saurait plus s’en passer, et qu’il faut vivre irréprochable pour pouvoir vivre satisfait.