Page:Joubert - Pensées 1850 t1.djvu/253

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la persuasion. On est pressé dans la vie, et ces caractères décidés, tout faibles qu’ils sont en secret, ressemblent à ces bornes qu’on aime mieux tourner que franchir, quand on les rencontre sur son chemin ; au lieu d’assiéger leurs opinions dans les règles, on les bloque, ou l’on s’en détourne.

Les esprits intraitables s’exposent à être flattés. On cherche naturellement à désarmer ceux qu’on ne peut pas vaincre, et qu’on ne veut pas combattre.

De toutes les monotonies, celle de l’assertion est la pire.

Il faut toujours avoir dans la tête un coin ouvert et libre, pour y donner une place aux opinions de ses amis, et les y loger en passant.

Il devient réellement insupportable de converser avec des hommes qui n’ont, dans le cerveau, que des cases où tout est pris, et où rien d’extérieur ne peut entrer. Ayons le cœur et l’esprit hospitaliers.