Page:Joubert - Pensées 1850 t1.djvu/309

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assez parée de ses livrées. L’esprit n’a fait que l’écarrir, comme une pièce de bois que la première main a dégrossie. La vérité, ou plutot la matière où elle se trouve, doit être maniée et remaniée, jusqu’à ce qu’elle devienne clarté, air, lumière, forme, couleur.

Gardez-vous de traiter comme contesté, ce qui doit être regardé comme incontestable. Ne rendez pas justiciable du raisonnement ce qui est du ressort du sens intime. Exposez et ne prouvez pas les vérités de sentiment. Il y a du danger dans les preuves ; car, en argumentant, il est nécessaire de supposer problématique ce qui est en question ; or, ce qu’on s’accoutume à supposer problématique, finit par paraître douteux. Dans ce qui est visible et palpable, ne prouvez jamais ce qui est cru ; dans ce qui est certain et caché, par sa grandeur et sa nature, faites croire et ne prouvez pas ; dans ce qui est de pratique et de devoir, ordonnez et n’expliquez pas. » crains Dieu " a rendu des hommes pieux ; les preuves de l’existence de Dieu ont fait beaucoup d’athées. Les défis font naître l’attaque ; tout plaidailleur rend chicaneur, et l’on passe presque toujours, du désir