Page:Joubert - Pensées 1850 t1.djvu/35

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pour se mcttrc au niveau des fonctions nouvelles qui lui étaient échues, u’avait-il pas a descendre des hauteurs où s’était plu jusque là sa pensée ! Les affaires ont leur importance sans doute ; elles tiennent une grande place dans la vie, et pèsent d’un poids considérable dans la balance des biens et des maux réservés aux sociétés et aux familles. Peut-être même les esprits qui savent s’y appliquer et les comprendre sont-ils plus précieux et plus rares qu’on ne l’imagine. Mais, quand elles ne touchent pas à de vastes intérêts, comme ceux des gouvernements ou des peuples, et que la politique ne les revêt pas de son manteau de pourpre et d’or, elles offrent peu d’attraits aux hommes qui ont plus vécu dans le domaine des idées que dans celui des faits. Habitues aux grandes évolutions de la pensée, aux splendides contemplations de la vérité et du beau, les philosophes et les poetes, ces enfants du ciel, se trouvent à l’étroit dans la région où s’ébattent les passions subalternes de la terre : d’invincibles élans les portent et plus haut et plus loin. M. Joubert y résistait de son mieux. 11 étudiait avec un soin poussé jusqu’au scrupule les causes déférées à son tribunal, les règlements ou les lois remis à sa défense. L’amour du devoir lui tenait lieu de vocation, et il était rare que les calculs de la cupidité, les ruses de la mauvaise foi ou l’obstination des plaideurs missent en défaut la perspicacité du juge ou l’habileté du conciliateur. Le souvenir de sa sollicitude et de ses succès vit encore à Montignac dans la mémoire des vieillards ; mais cette mission de paix, quelque habile qu’il fut à la remplir, n’eu était pas moins une mission de contrainte et d’efforts. Aussi, quand, vers l’expiration