Page:Joubert - Pensées 1850 t2.djvu/107

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Pour moi, je recherche beaucoup dans les livres l’expression juste, l’expression simple, l’expression la plus convenable au sujet mis en question, à la pensée qu’on a, au sentiment dont on est animé, à ce qui précède, à ce qui suit, à la place qui attend le mot. On parle de naturel ! Mais il y a le naturel vulgaire, il y a le naturel exquis. L’expression naturelle n’est pas toujours la plus usitée, mais celle qui est conforme à l’essence. L’habitude n’est pas nature, et le meilleur n’est pas tout ce qui se présente le premier, mais ce qui doit rester toujours.

La manière est à la méthode ce que l’hypocrisie est à la vertu ; mais c’est une hypocrisie de bonne foi ; celui qui l’a en est la dupe.

On appelle maniéré, en littérature, ce qu’on ne peut pas lire, sans l’imaginer aussitôt accompagné de quelque gesticulation menue, de quelque mouvement peu franc, peu partagé par la totalité de l’homme. Le précieux ou l’afféterie fait imaginer le pincement. Le ridicule donne une idée de contorsion. On ne