Page:Joubert - Pensées 1850 t2.djvu/286

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278 dedaigneux de prevoir, si negligent A me precautionner, si prompt h donner; si inhabile h acquérir, si` juste , en un mot, et si peu prudent, que l’avenir l°inquieta. Un jour qu’elIe et mon pere me reprochaient ma gene- rosité , avant mon depart pour Paris , je répondis tres- fermement ii que je ne voulais pas que l’eme d’aucune •= espece d’bommes ent de la supériorité sur la mienne; ii que e’était bien assez que les riches eussent par-des- ¤ sus moi les avautages de la richesse , mais que oertes c ils n’auraient pas ceux de la générosité. » Elle me vit partir dans ces sentiments; et , depuis que je l’eus quittée, je ne me livrai qu‘b. des occupations qui ressemblent h l’oisivete, et dont elle ne connaissait ni le but, ni la nature. Elles m`ont procure quelquefois des te- moignages d’estime, des possibilités d’elévation, des hom- mages meme dont j’ai pu etre {latte. Mais rien ne vaut, je · l`eprouve, ees sulfrages de ma mere. Je vous parlerai I d’elle pendant tout le temps que nous nous reverrons, car ` j’en serai occupé tant que pourra durer ma vie. La sienne I est bien aliaiblie. Elle ne mange presque pas , et soulire souvent d’un asthme sec qui est Vinfirmité decidée ou la delicatesse de son temperament a abouti. Elle dit cepen- I dant qu’elle se porte bien; mais elle se trompe et nous trompe. Sa resignation domine maintenant sur toutes les autres perfections qui avaient autrefois tant d’éclat... .. Je ne sais trop ce que j’ai pu _vous dire dans cette lets tre. Suppléez a tout ce qui peut y manquer, car pour rien - au monde je ne la relirais. La derniere m’avait soulagé; i mais j’ai mal pris mon temps pour celle-ci. Hier a été un · mauvais jour, et je m’en ressens aujourd`hui. Ne vous en mettez pas en peine, car je serai guéri demain, ou tout I uu moins apres-demain. · i

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