Page:Joubert - Pensées 1850 t2.djvu/288

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· t I 280 et des plus hahiles professeurs de l’Europe. Cela prouve , ne vous deplaise , qu’avec notre admirable philosophic I moderne, on peut savoir et enseigner beaucoup de choses; sans en avoir la moindre idee. Que me parlez·vous de Manes? Je deteste ce vilain nom , et je ne me souviens pas de m`etre jamais permis de l’é- crire ou de le prononcer, meme en badinant. J’aime assez lcs erreurs naives et les sottises natural- .les; mais quant aux savantes erreurs qui se fahriquent avec art, je les hais autant que ces erreurs de mauvaise foi, ces errcurs fausses que notre Benjamin Constant m’a le premier fait distinguer. Je crois meme que je n’aime pas les verites qui ne sont tel les que par reflexion : autre grief contre ce siecle, oin l’on n’a guere que des idecs et q iles sentiments calculés. ' Votre Maues etait un fourbe , qui se trompait par va- _ nite. Quoi qu’en disc votre cuisine , notre France et le ` monde entier, ne laissez pas entrer un seul moment, dans . votre esprit aimahle, cette opinion gigantesque et tene- Q ` hreuse des deux principes; cela n’est point du tout plai- sant.De honnes gens ont cru au diahle; mais il n’est qu’un _ mauvais valet, ct cela , du moins, est naif. Mais imaginer deux principesl Que d’ell`orts il faut pour cela , et quelle erreur laborieusel ` ll n’y en a qu’un, et il a fait ce qu’il a pu. Ne vous - amusez plus a n’en rien savoir. Vous ressemhlez quelque- this in un tilleul que l’on m’a apporte hier, et dans les mains duquel on a mis quelques ecus. Vous avez , au fond de vous·méme , unc foule d’excellentes pensees et de verites i admirahles.; mais vous aimez mieux les jeter par terre, et les faire rouler, qu’en faire un veritable usage. Ne vous » génez pas ccpendant , ne contraignez pas votre esprit; ` Digitized by GOOg[€