Page:Joubert - Pensées 1850 t2.djvu/314

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avec plus d’agrément, de sagesse et de facilité , et a remplir de sons plus bcaux les vides oil ils font entrer leurs pensées ; s’il parvenait a les convaincre que ce qu’ils imaginent de vrai est vrai, et qu‘ils sont aussi surs de ce qu’ils pensent que de ce qu’ils voient, il leur deviendrait fort • utile, et il en serait honoré comme un bienfaiteur. Vous seriez fort propre a ce dessein.

Laissez mon esprit se reposer de tant de figures de rhétorique. Je termine et je vous dis sans figure : En substituant de meilleures pensées it celles dos autres, ne croyez pas que celles-ci soient dépourvues de tout bien; car, comme le disait Fontenelle , et comme l’a presque dit Pascal, il est certain qu’en pareille matiere surtout, tout le monde a raison.

XXXIII.

Villeneuve-sur-Yonne , 23 aout ams. I

A madame de Beaumont, au Mont-d’Or.

Quand vous ne recevez pas de nos lettres, c’est tout au plus pour vous un petit plaisir de moins dans le monde; mais quand nous ne recevons pas des votres, nous souf- frons un insupportable tourment. Ne fut-ce qu’en sa qualité de croyauce du mal et d’opposé de Pespérance , la crainte est toujours en moi un sentiment contre nature. Jugez donc en quel état violent me reduisaieut les peurs de toute espéce qui m’agitaient depuis buit jours, et dont vous étiez le sujet. J’avais tardé is m’elTrayer; mais, lorsque le temps que j’avais naturellement prescrit is mon attente, out expire; quand ces courriers, qui passent trois fois la semaine, se furent suocédé sans rien apporter de vos eaux; Iorsqu’enfin le terrible Non qu’on répondait