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Quand, en septembre 1918, Marie Lenéru mourut, elle avait quarante-trois ans. Elle était déjà célèbre. Ses pièces étaient jouées, ses articles, ses essais — dont le Saint-Just paru dans les Cahiers Verts — étaient publiés par les meilleurs périodiques et les grands journaux. Dans le monde littéraire français elle était quelqu’un.

Ce n’est pas cependant cette célébrité-là qui fit d’elle « la grande Marie Lenéru ».

Ce fut, quatre ans après sa mort, la publication de son Journal.

Ce jour-là, toute la critique française s’est émue. Des articles signés des meilleurs noms parurent à Paris, en province et bientôt dans la presse européenne. Et le Journal de Marie Lenéru prit rang à côté des plus illustres journaux intimes.

C’était une révélation. Non pas d’un talent bien connu et qui ne faisait là que s’affirmer, mais de l’origine humaine de ce talent. Car c’était la révélation de la manière dont Marie avait fait Marie. Une grande histoire.

Pourtant, dans le Journal de Marie Lenéru, elle n’était pas complète. La formation de l’esprit, la formation du caractère, la naissance de l’épreuve, l’accueil fait à l’épreuve, à la vie bouleversée, la création de Marie par Marie, tout cela ne commence pas à la date à laquelle s’ouvre le Journal. D’autres pages existaient. On les a appelées Journal d’enfant. Elles ont été publiées fragmentairement ou séparément, en raison sans doute de la longue interruption qui suivit la fin du premier « cahier ». Or, le vrai commencement était là. Il n’y a qu’un Journal de Marie Lenéru.

L’édition de 1922 est épuisée depuis longtemps. La présente édition est prête depuis plusieurs années, et doit aux événements sa longue attente. Peut-être vient-elle à son heure.

En la préparant, en en révisant le texte, le soin que j’ai pris de le rendre scrupuleusement conforme au manuscrit autographe