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Page:Journal asiatique, série 1, tome 3.djvu/155

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vous est arrivé quelque chose d’extraordinaire. Pourquoi ne me diriez-vous pas ce que c’est ? »

— « Pour celui qui a traversé l’océan, il n’y a plus d’eaux sur la terre », répondit Lieou-thsing ; « pour celui qui s’est élevé sur la montagne des enchantemens, il n’y a plus de nuages dans l’air. Puisque vous avez pu vous tromper à mon avantage, jusqu’à louer mes dehors vulgaires, et m’accorder de la beauté, je regrette bien que vous ayez tardé d’un pas. Si vous étiez arrivé un instant plutôt, vous auriez vu cette jeune fille dont les eaux les plus pures ont tracé les contours, dont la glace et la neige ont formé la taille, et vous auriez pris ma laideur en aversion. Tout ce que j’avais vu de beau jusqu’à ce jour n’avait fait sur moi qu’une impression passagère ; mais aujourd’hui cette jeune fille s’est emparée de toute mon âme. Voilà la cause de cette absence profonde où vous m’avez surpris. Les anciens vantaient la beauté des femmes de Yen et de Tchao[1] ; mais qui eût dit qu’il y avait dans le Kouang-Toung une aussi charmante personne ? »

— « Doué vous-même d’une rare beauté, » répondit avec étonnement Hoa-thian, « puisque vous louez la sienne, il faut croire qu’elle a des charmes plus qu’humains ; mais nous ne savons pas à quelle famille elle appartient ; il faut nous en instruire. »

En conséquence, il chargea des gens du bureau

  1. Contrées situées dans le nord de la Chine.