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QUELQUES TERMES TECHNIQUES BOUDDHIQUES.

nos jours, ce qui facilitait même singulièrement l’introduction de la langue ottomane au regard de la prononciation. Mais à voir la quantité vraiment énorme de mots et de locutions turques qui défilent dans le parler courant de Roumélie, on n’hésite pas à attribuer à l’élément osmanli une part très notable dans la transformation profonde subie par la phonétique grecque dans ces régions.

Un des phénomènes les plus caractéristiques de cette métamorphose (mais où le slave peut être aussi bien en cause que le turc), c’est l’emploi extrêmement fréquent, dans les mots grecs, de la chuintante ch (š) et de ses composés κš, τš , pour les sifflantes σ, ξ, τσ. À force de prononcer ou d’entendre prononcer autour de lui des mots turcs en ‎ش, ‎چ, et des mots slaves en ш-ša, ц-tša, щ-štša, le Rouméliote a fini par transporter ces sons dans le vocabulaire même de sa langue native ; non arbitrairement toutefois, car l’expérience atteste qu’il a suivi en cela certaines lois de phonétique, difficiles peut-être à analyser, mais qu’on peut réduire à cette formule : devant les sons ε et ι, la sifflante se change ordinairement en chuintante : šὺ, pour σύ, « toi » ; κšεύρεις (prononcé couramment κšέρʼς), pour ξεύρεις, « tu sais » ; μὶ τšυγι(ει)ὲς , pour μὲ τὲς ὑγιεῖες[1] « bon appétit »


    index bibliographiques très complets, nous a été un excellent appoint pour notre étude, spécialement pour la partie étymologique. Le ton très modéré de l’auteur en ce qui concerne la question si brûlante du grec vulgaire est une garantie de plus pour la justesse des solutions qu’il propose. Nous lui en voulons seulement d’avoir tellement multiplié les sigles abréviatifs, que la lecture de son ouvrage devient par moments un véritable casse-téte.

  1. D’autres écrivent μὲ ταὶς ὑγιείαις, ou même ταῖς. Il nous semble que les uns et les autres, tout en conservant aux mots un cachet plus grec, n’ont pas de raison suffisante d’en agir ainsi. Les seconds transportent à l’accusatif féminin pluriel l’accent circonflexe du datif (car c’est bien l’accusatif que gouverne la préposition μὲ, apocopée de μετὰ ; les autres gardent bien l’accent grave de l’accusatif littéral τὰς, mais on ne voit pas pourquoi ils remplacent la voyelle simple α modifiée en ε, par la diphtongue αι. Quant à ὑγιεῖες, voir dans H. Pernot, Grammaire grecque moderne, Paris, 1897, Introd., p. xxix, une excellente raison de l’écrire aussi avec un ε désinentiel au lieu de αι.