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JOURNAL DE GOUVERNEUR MORRIS

sac. J’avais vu cette dernière chez M. de Montmorin. Elle semble très libre et très à son aise ; il reste à savoir si c’est le résultat d’une vertu au-dessus de tout soupçon, ou d’une indifférence aux apparences. Elle est assez belle et joue bien du clavecin. M. de Bonnay, qui devait dîner, arrive tard de l’Assemblée. On a approuvé un décret par lequel les membres de la Chambre des Vacations sont déclarés incapables de remplir aucune charge, ou d’être électeurs ou éligibles, jusqu’à ce qu’ils annoncent à l’Assemblée leur adhésion à la Constitution. Ceci est fort, mais le comte de Mirabeau était d’avis de les envoyer au Châtelet et de les juger pour crime de lèse-nation.

Je vais de là chez Mme de Chastellux. Mme de Ségur, le maréchal et le comte arrivent. La conversation roule sur le décret du jour, de même que chez Mme de Staël. Je prétends que ce décret est nul d’après les principes de l’Assemblée elle-même, qui s’est déclarée incompétente dans l’ordre judiciaire. Ceci donne prétexte à une longue dispute, à laquelle je prends plus de part que la chose ne vaut ; mais c’est la tournure de la société d’ici ; il faut s’y conformer ou cesser de venir. Ce dernier plan serait peut-être le plus sage.


13 janvier. — Je vais au Louvre après le dîner, et je trouve Mme de Flahaut profondément affligée de l’idée de quitter Paris. Elle a des affaires qui l’empêchent de venir avec moi choisir un surtout de table avec ornements. L’évêque arrive. Il m’a fait admettre membre d’une société dont je ne connais pas exactement le but, mais qui est néanmoins une société choisie. Il espère obtenir un million de la spéculation proposée à Mme de Flahaut. Il me dit que les membres du parlement de Bretagne sont venus volontairement, parce qu’ils redoutaient la violence de la municipalité de Rennes. Ceci est extraordinaire, Rennes ne vivant que de la présence du parlement. Il y a eu une