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JOURNAL DE GOUVERNEUR MORRIS.

désespoir. Il répond qu’il pourrait leur donner le coup de grâce, s’il le voulait, car il a des raisons de croire que l’on s’occupe de l’affaire des rations. Je lui dis que je l’ignore, mais que je le saurai. Il me demande si je reviendrai de Londres pendant le mois de juin. Je réponds affirmativement. Notre conversation est interrompue et je promets de dîner avec lui demain


31 mai. — À Eu. Je vais voir la duchesse d’Orléans, ce matin, et je déjeune dans sa chambre avec Mme de Chastellux. Elle fait annoncer à son père mon arrivée et mon désir de le voir. Le vieillard répond de façon très polie, et nous décidons de dîner ensemble. Je trouve ici beaucoup de contrainte et d’étiquette. Après le déjeuner, elle me lit les lettres qu’elle a échangées avec le duc, puis nous faisons une promenade jusqu’au dîner. Elle me raconte l’histoire de leur rupture en remontant très loin, et les manœuvres employées par son mari et par son entourage. C’est un bien triste sire. Elle me dit que ce que l’on considérait comme tendresse de sa part, à elle, n’était que de la prudence. Elle espérait l’amener à une conduite plus décente et régulière, mais elle a enfin découvert que seule la crainte avait prise sur lui. Elle me raconte ses difficultés pour décider son père à agir. Il est nerveux et tremble devant tout ce qui ressemble à un effort. Le dîner est excellent ; au cours du repas et pendant la conversation qui le suit, je fais quelques progrès dans l’estime du vieillard. Ils s’embarquent dans une grande voiture pour prendre l’air après le dîner, et je vais à mon hôtel. N’ayant rien à faire, je commande des chevaux ; je pars à six heures et quart, et à neuf heures et demie, j’atteins Dieppe.


25 juin. — À Londres, nous apprenons que le roi et la reine de France ont réussi à s’échapper des Tuileries et