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JOURNAL DE GOUVERNEUR MORRIS.

miné à se défendre ; la place lui est indifférente, mais il luttera pour sa réputation. Je fais une courte visite à Mme de Ségur, et promets de revenir lui donner les nouvelles que je recueillerai. Elle est très inquiète au sujet des colonies et avec elle se trouve une personne qui se déclare complètement ruinée. Elle a perdu tout entrain. La même chose se présente pour le duc de Xérès chez Mme de Laborde. Je retourne chez Mme de Ségur lui communiquer les nouvelles qui ne sont pas encore trop mauvaises pour Port-au-Prince, où sont les propriétés de son mari. Je vais chez l’ambassadrice d’Angleterre. Ses manières me montrent que mes vers ont porté. Elle me dit ensuite qu’elle a été honteuse, flattée et enchantée. Tant mieux. Je répète à l’abbé de Montesquiou une partie de ce que j’ai dit ce matin à M. de Montmorin sur les moyens d’établir une constitution pour la France. Son esprit est ouvert à ces idées. Nous avons ici tout le monde et sa femme (sic). Mme de Tarente me dit qu’elle m’aime parce j’aime la reine, et son accueil prouve que ma conversation ne lui déplaît pas. Je l’abrège. Pendant le souper, je fais remarquer à l’ambassadrice qu’elle ne mange pas, et qu’elle est simplement un plat à sa propre table et non le pire, mais qu’elle n’a pas la politesse de demander qu’on le goûte. Mme de Montmorin veut savoir de quoi nous parlons en anglais. Lady Sutherland répond : « Il me dit des méchancetés ! » — « Ah, il en est bien capable ! » — Mme de Staël arrive tard, et Mme de Tarente lui fait la grimace.


10 novembre. — J’insiste près de M. de Montmorin pour qu’il prépare une réponse du roi au décret contre les émigrés, et je le laisse à cette occupation. Je dîne chez Mme de Staël et j’y rencontre l’abbé Raynal. Il me fait des avances. Je les reçois froidement, car j’ai peu de respect pour lui. Après le dîner, Mme de Staël me demande mon avis sur l’acceptation du ministère des Affaires étrangères par son