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JOURNAL DE MARIE LENÉRU

refus d’invitation, dix lignes, relations nullement intimes, avec l’aspect guilleret de l’esprit qu’on veut faire, m’avait déplu. D’impeccables formules de politesse m’auraient bien plus renseignée sur la qualité de la dame. C’est misérable de faire son métier de bel esprit à toute réquisition, il faut mépriser les petits bénéfices. Ah ! le grandiose et délicieux bon ton que les aristocrates inventèrent… que d’esprit il fallut y dépenser !

L’authenticité est le seul pittoresque.

Savoir s’entourer des choses présentes.


16 octobre.

J’ai passé trois quarts d’heure à la mansarde, ayant trouvé dans la caisse d’incendie des papiers que je ne pouvais plus quitter. La correspondance du « Consul de France aux Îles Canaries, Ste-Croix de Ténériffe, Baron Chassériau » qui a veillé la dernière nuit de mon père. C’est sur grand papier de chancellerie, doré sur tranches.

Mon père ne se voyait pas mourir, dit-il. Allons-donc ! Après « une longue confession, ayant parlé d’objets à remettre à Marie[1]» et regardé mon portrait de toute petite fille d’un an. Pourquoi enlever l’héroïsme aux mourants, sous prétexte de nous accorder un soulagement ?

  1. Madame Lenéru, dont c’est aussi le nom.