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JOURNAL DE MARIE LENÉRU

les ai pas, que ma vie se passe, et bientôt se sera passée sans elles.

J’ai toujours eu le jugement inexorablement net, et la notion du but singulièrement précise et détachée de tout ce qui est moyen.

Je n’admets pas le cercle vicieux et ne donnerai pas le nom de fin à un point quelconque de la ligne perdue. Or, je n’ai jamais ressenti, dans mes jours, que la fièvre du passage et le goût uniquement de l’ascétisme. Je demande la sensation de l’arrivée. Je n’aurai pas, à travers tant d’obstacles, accru si prodigieusement ma « volonté de vivre » pour aller finir dans une région perdue de la vieillesse. Je n’aurai pas, avec des matériaux de destinée qu’il m’est loisible d’appeler exceptionnels, créé en moi, à force d’intensité, une âme exceptionnelle, pour la satisfaction cabotine d’une jouissance d’esthète.

Elles donnent l’impression d’une chose rare chez les femmes, même de 60 à 70 ans, du sérieux. Pour le combiner il faut une dose de simplicité qui demande trop d’intelligence et pour l’imposer à l’enfantillage ambiant une imperturbabilité qui est du caractère.

À Mme D… Cette documentation me pèse horriblement. Il faut faire de la besogne inutile. Il faut avoir lu ce qui ne servira pas. Cela me rend sans indulgence envers les noms et les styles d’inconnus. L’homme ordinaire est une chose ridicule.