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journal de marie lenéru

nesse, au bonheur et en vertu duquel vous ne pouvez plus me traiter ni en enfant, ni en femme, ni même en créature ordinaire, puisque rien sur la terre n’est fait pour moi.

Car c’est bien l’épreuve absolue, celle qui rompt tous les liens d’une destinée avec le passé et l’avenir, qui altère tout, qui sépare de tout, la plus grande isolatrice après, peut-être même avant la mort.

Eh bien, mon Dieu, qui savez tout cela, qui savez avec quel dégoût je marche à cet avenir auquel je ne peux penser sans ressentir une chute au dedans de mon âme, sans éprouver physiquement le désespoir, accordez-moi, peut-être pas la seule chose que je désire, mais la seule que je veuille vous demander, accordez-moi l’intelligence de ce que vous me voulez !

Et je vous promets au moins, quels que soient mes désappointements, mes lassitudes, mes efforts perdus, l’absolu désintéressement pour ce qu’il ne m’aura pas fallu, la complète insouciance finale pour ce qui ne devait pas être moi.


Samedi 27 février.

Écrire peu et vivre peu, identique pour moi.

J’ai beau faire, je m’y prends mal. Ce perpétuel raidissement amène des réactions atroces. Je dépense