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leurs enfants obtiennent les diplômes d’élèves du collége de France, et le pouvoir se trouvera bientôt en présence d’une armée de petits administrateurs avides et besoigneux, matière première de la corruption. Qu’on y prenne garde, c’est encore par là que seront ébranlées les nouvelles institutions politiques que la France vient de se donner, et dont beaucoup d’hommes, que la faveur populaire a poussés aux affaires, ne nous font pas l’effet de comprendre l’essence et la portée. Mais, c’est là un sujet que nous ne voulons pas traiter aujourd’hui, nous bornant à appeler l’attention de nos lecteurs sur la manière inintelligente avec laquelle M. Carnot et ses conseillers ont touché au collége de France.

Cette institution avait besoin d’être remaniée en quelques points ; les cours sans auditeurs devaient être supprimés ; les professeurs qui, sous prétexte d’indépendance, ne font pas leurs leçons ou les font porter sur des sujets complétement étrangers au titre de leur chaire, devaient être rappelés au programme, etc., etc. Donc, nous trouvons que M. Carnot a sagement fait en réunissant le cours de poésie latine et celui d’éloquence latine en un seul, en supprimant la chaire de turc, qui fait double emploi avec celle de l’école des langues orientales, établie à la Bibliothèque nationale, et en arrangeant les choses pour que les deux professeurs supprimés ne soient pas complétement privés de leur pain quotidien.

Nous approuverons encore la création de la chaire de mécanique, supprimée par arrêt de 1772, dit le décret, si le professeur comprend la nécessité de ne pas faire double emploi avec le cours de mécanique professé à la Sorbonne, à quelques pas du collége de France. Rien de plus désirable, en outre, que le cours de droit administratif proprement dit, et celui de droit administratif comparé. Sous ce rapport, M. Carnot a donné satisfaction à un véritable besoin.

Le cours de droit de législation comparée est supprimé ; mais on le remplace par un cours de droit politique français et de droit politique comparé. C’est une manière de destituer le professeur titulaire actuel, M. Lherminier, qui était suppléé avec talent par M. Rapetti. Le procédé n’est ni franc ni digne. On comprend la destitution de M. Lherminier, quand on se rend compte des raisons qui l’avaient obligé à suspendre son cours ; mais il est difficile de s’expliquer l’injustice commise à l’égard de M. Rapetti, qui se trouve, par le fait, privé d’une chaire qu’il occupait depuis huit ans. Quant au titre du cours, le premier valait tout autant que celui qu’on a choisi, et ce n’était pas la peine de le changer. L’emploi des synonymes, en pareil cas, rappelle toujours la facétieuse proclamation des Bourbons en 1814 : « La conscription est abolie ; on pourvoira désormais aux besoins de l’armée par le recrutement. » La chaire du droit de la nature et des gens fait place à la chaire de droit international et d’histoire des traités. Au fond, l’objet du cours est le même, et nous pensons qu’il valait encore